Lorsque l'un de nos proches présente une aphasie, que ce soit l'aphasie de Broca ou de Wernicke, il est normal de se poser de nombreuses questions devant ce trouble du langage parfois impressionnant.
PagesJaunes fait le point sur ces deux célèbres apahasies afin d'y voir un peu plus clair.
Qu'est-ce qu'une aphasie ?
Une aphasie est l'ensemble des troubles de la communication du langage dus à des lésions cérébrales acquises (Accident Vasculaire Cérébral, Traumatisme Crânien, Tumeur Cérébrale etc.).
L'hémisphère cérébral qui s'occupe du langage est principalement l'hémisphère gauche. Lorsqu'une lésion cérébrale endommage cette partie du cerveau, cela altère à des degrés divers l'expression et/ou la compréhension à l'oral et/ou à l'écrit.
Il existe plusieurs types d'aphasies que l'on classe selon deux catégories :
- Les aphasies fluentes : le patient parle, parfois beaucoup (logorrhée). Son discours n'est pas toujours compréhensible et peut ressembler à du jargon. C'est le cas de l'aphasie de Wernicke.
- Les aphasies non fluentes : le patient a une diminution du débit verbal qui peut aller jusqu'au mutisme, comme pour l'aphasie de Broca.
Aphasie de Broca : symptômes et traitements
Elle fait partie des aphasies non-fluentes. Dans chaque aphasie de Broca, on retrouve des signes communs, à des degrés de gravité différents selon chaque patient.
Perturbations du langage oral en cas d'aphasie de Broca
Une personne présentant une aphasie de Broca a des difficultés pour parler spontanément :
- On retrouve souvent une période de mutisme.
- La prosodie (« musique de la parole ») est altérée donc les petites phrases prononcées semblent plates, sans intonation.
- Le patient prononce de 0 à 5 mots dans une phrase.
- Il présente des difficultés à réaliser des praxies (mouvements) de la bouche et du visage. On parle d'apraxie bucco-faciale.
- Des difficultés à articuler les mots sont présentes.
- Si le patient récupère le langage, il cherche souvent ses mots (manque du mot), ne finit pas ses phrases et déforme les mots (paraphasie).
La compréhension est souvent normale, le patient comprend une conversation mais la répétition de mots est mauvaise et la dénomination d'objets est perturbée car le patient n'arrive plus à accéder au mot qu'il cherche.
Exemple : si on lui demande de nous nommer/dire l'objet « chaise », le patient reconnaît l'objet, il sait à quoi cela sert mais il n'est plus possible pour lui de donner le bon mot. Il pourra dire « table » à la place ou ne rien dire du tout.
Aphasie de Broca et perturbations du langage écrit
Le langage écrit est perturbé de plusieurs manières :
- L'expression écrite est perturbée, les phrases sont réduites, contiennent peu de mots ou alors les mots ne sont pas dans le bon ordre.
- La compréhension écrite est altérée notamment lorsque les énoncés sont longs.
- La lecture à haute voix est perturbée voire impossible (alexie).
Bon à savoir : des perturbations motrices peuvent apparaître : en fonction de la localisation de la lésion cérébrale, le patient peut avoir une hémiplégie droite.
Aphasie de Broca : examen orthophonique
Une fois le diagnostic posé, la rééducation peut commencer sans tarder en lien avec tous les professionnels qui entourent le patient (médecin, kinésithérapeute, neuropsychologue, ergothérapeute, etc.).
Chaque orthophoniste a ses propres méthodes et sa façon de faire. Cependant, chaque technique n'a qu'un seul but : améliorer le langage du patient :
- Démutiser le patient : lorsque que le patient est mutique l'orthophoniste doit réussir à lui faire produire un mot spontanément.
- Une fois cette première étape franchie, il faut rééduquer les troubles de la compréhension orale : l'orthophoniste travaille à partir d'objets réels ou d'images qu'il fait désigner, nommer et catégoriser par le patient.
- Lorsque le patient présente des difficultés à réaliser les mouvements du visage (apraxie bucco-faciale) l'orthophoniste va rétablir la bonne production de ces mouvements par des exercices d'imitation de gestes simples, de souffle, etc.
- Il faudra également stimuler et faciliter les productions grammaticales afin que le patient produise des phrases plus longues et mieux construites.
- Pallier le manque du mot avec des exercices de répétitions, de catégorisations, d'évocations de mots.
- Rééduquer l'alexie (trouble de la lecture) et l'agraphie (trouble de l'écriture) avec des exercices très spécifiques adaptés à chaque patient. La priorité sera de rétablir les automatismes sur l'état civil (nom, prénom, date de naissance…).
Signes et examen de l'aphasie de Wernicke
Elle fait partie des aphasies dites fluentes. Pour ce type d'aphasie, nous allons également retrouver des signes communs, à des degrés de gravité différents selon chaque patient.
Perturbations du langage oral
En langage spontané, la prosodie est conservée et la syntaxe (ordre des mots dans la phrase) est souvent bonne, mais le langage du patient est perturbé car le débit de parole peut être très important voire incanalisable. Le patient n'est pas toujours compréhensible lorsqu'il s'exprime car il peut y avoir des transformations de certains mots et/ou un jargon.
La surdité verbale est un trouble fréquent dans les aphasies de Wernicke. Le patient n'a pas de réelle surdité, bien qu'il se comporte comme un malentendant, il entend normalement mais il n'arrive plus à reconnaître et analyser les mots. La parole est alors perçue comme un bourdonnement ou une langue étrangère. Ce trouble entraîne :
- de grosses difficultés de compréhension orale ;
- une répétition des syllabes ou des mots impossible ;
- l'impossibilité d'écrire une dictée de mots car les sons ne sont pas reconnus ;
- le patient à beaucoup chercher ses mots (manque du mot).
Perturbations du langage écrit
Des difficultés similaires à celles retrouvées à l'oral sont retrouvées. Le patient peut écrire, il n'a pas de problème pour le graphisme, mais, tout comme il parle sans pouvoir s'arrêter, le patient peut écrire énormément sans être forcément compréhensible.
Parfois la compréhension écrite est un peu meilleure que la compréhension orale surtout lorsque le patient est atteint de surdité verbale.
Aphasie de Wernicke : rééducation
La première étape consiste à canaliser la logorrhée en établissant une situation d'échange : respect des tours de parole, enregistrer le patient, etc.
Si le patient soufre de surdité verbale, l'orthophoniste va rétablir la compréhension de la parole. Pour cela il faut faire prendre conscience au patient des mouvements à effectuer avec la bouche pour parler, lui expliquer comment réaliser les sons, faire tout un travail d'identification de sons et de mots.
Les autres points de la rééducation sont les mêmes que pour l'aphasie de Broca : pallier le manque du mot, rétablir les productions grammaticales, rééduquer l'alexie et l'agraphie si besoin.
Chaque patient est unique et l'orthophoniste va adapter sa prise en charge selon le patient. Les difficultés, la sévérité et les chances de récupération varient beaucoup d'une personne à l'autre.
Bon à savoir : il est fréquent que la rééducation commence à l'hôpital, notamment en hôpital de jour où le patient se rend plusieurs fois par semaine et qu'elle se poursuive chez une orthophoniste installée en libéral lorsque le patient rentre chez lui.
Examens orthophoniques de l'aphasie
Ces examens peuvent être réalisés au chevet du patient à l'hôpital dès que son état de vigilance le permet. Ils ont pour but de révéler les processus perturbés mais également ceux qui sont préservés.
C'est également l'occasion d'un premier contact avec la famille du patient qui va permettre de déterminer son niveau socio-culturel. Ils ne diffèrent pas selon les patients et vont permettre de déterminer de quel type d'aphasie souffre le patient et son niveau de gravité.
Examen de l'expression orale et écrite
L'orthophoniste commence par faire un état des lieux du langage oral du patient grâces à différentes épreuves :
- Épreuves de langage spontané : le patient est amené à donner son nom, sa date de naissance, son adresse, etc. Si possible, l'orthophoniste peut engager un dialogue avec lui, par exemple à propos de ses dernières vacances. Ce premier contact permet à l'orthophoniste de voir si le patient parle, s'il est fluent, s'il jargonne, s'il faut le relancer, si son discours est informatif.
- Épreuves de répétition : de syllabes, de mots et de phrases. Ces épreuves permettent d'observer plus finement la perception auditive du patient, son articulation et sa mémoire (combien de syllabes ou de mots peut-il répéter à la suite).
- Épreuves de dénomination : le patient doit dire le nom des images ou des objets que l'orthophoniste lui présente (une pomme/une chaise/un marteau/un éléphant etc.). Cette épreuve permet d'évaluer la façon et la vitesse à laquelle le patient accède à son stock lexical (sa « réserve » de mots).
Les questions posées lors de l'examen de l'expression écrite, sont les mêmes que lors de l'examen de l'expression orale (état civil, récit personnel, dénomination) mais cette fois le patient répond à l'écrit.
À cela s'ajoute une dictée de syllabes, de mots et de phrases si possible, ainsi qu'une épreuve d'épellation. Ces épreuves permettent d'évaluer les capacités motrices du patient à écrire et ses difficultés à trouver le bon mot.
Examen du langage élaboré et de la compréhension orale et écrite
Les épreuves du langage élaboré sont proposées aux patients présentant des difficultés mineures aux épreuves précédentes : définition de mots, trouver des synonymes ou des contraires, expliquer des expressions imagées, etc.
Quant à l'examen de la compréhension orale et écrite, il se fait par la lecture de mots puis de phrases et, si possible, de textes. Puis le patient répond à des questions sur ce qu'il vient de lire (compréhension écrite) ou ce que l'orthophoniste lui a lu (compréhension orale).