L'aphasie fait partie des troubles de la parole pour lesquels l'orthophonie propose une rééducation efficace.
Définition de l'aphasie
L'aphasie est la perte totale ou partielle de la capacité de parler ou de comprendre un message parlé ou écrit. C'est aussi l'impossibilité d'associer une idée avec les mots justes.
L'aphasique ne présente pour autant aucune anomalie des organes de la parole (langue et larynx), de la vue et de l'ouïe. L'aphasie n'est donc pas la conséquence d'une surdité ou d'un trouble des organes de la parole.
Pour les spécialistes du langage, il existe une différence entre trouble de la parole et trouble du langage. L'aphasie réunit ces deux troubles, et pose donc des problèmes tant dans l'expression que dans la compréhension du langage.
À noter : en France, on estime à environ 300 000 le nombre de patients aphasiques nécessitant une rééducation du langage.
Causes de l'aphasie
Quatre grandes causes peuvent être à l'origine d'une aphasie :
- les maladies cérébro-vasculaires ;
- les tumeurs du cerveau (bénignes ou malignes) ;
- les traumatismes crâniens ;
- les maladies dégénératives.
Les maladies cérébro-vasculaires
Il existe deux types de maladies cérébro-vasculaires :
- Les accidents hémorragiques intracrâniens, dus à la rupture d'une artère :
- soit en raison de la rupture d'une malformation d'une artère ;
- soit en cas de complication d'une hypertension artérielle.
- Les accidents vasculaires cérébraux (140 000 AVC par an responsables de 30 000 cas d'aphasie), dus à une mauvaise irrigation de certaines zones du cerveau. Ces accidents surviennent le plus souvent suite à une thrombose ou à une embolie de l'hémisphère gauche, où se trouve la plus grande partie de la zone du langage.
Bon à savoir : chez l'enfant, seule la moitié de ces AVC ont une cause identifiée (malformation congénitale, pathologie cardiaque...) et près de 70 % d'entre eux gardent des séquelles.
Les tumeurs du cerveau
L'aphasie survient lorsque les tumeurs, qu'elles soient bénignes ou malignes, concernent l'hémisphère gauche. Les symptômes évoluent en fonction de l'importance de la tumeur. Ils s'aggravent donc lorsqu'elle se développe.
De nouveaux symptômes pouvant faire leur apparition ; à terme, le patient peut présenter une hypertension intracrânienne avec un risque d'hémorragie.
Les traumatismes crâniens
Les troubles se manifestent suite à :
- un choc violent ;
- un hématome (saignement avec risque de provoquer un œdème cérébral) ;
- un coma ;
- un anévrisme d'un vaisseau qui risque alors de se rompre ;
- une hémorragie cérébrale ;
- plusieurs de ces causes à la fois.
Ce sont surtout les aires frontales (au niveau du front) et temporales (celles situées latéralement) qui sont vulnérables, en particulier chez le jeune adulte.
À noter : les chances d'amélioration sont plus importantes que dans le cas des AVC.
Les maladies dégénératives
Les démences de type Alzheimer et les démences corticales telles qu'on les observe dans la maladie de Parkinson sont les plus à risque.
À noter : l'aphasie peut avoir une origine infectieuses, inflammatoire (abcès, par exemple) ou être due à une encéphalite (en cas de sida ou d'herpès), mais ceci reste très rare.
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Différents types d'aphasie
Anatomie du cerveau
De façon très générale, l'aphasie est due à une mauvaise irrigation du cerveau entraînant des dommages dans les zones du langage.
Le cerveau peut être divisé en plusieurs zones, chacune ayant sa spécificité.
L'aphasie se manifeste lorsque l'hémisphère gauche du cerveau est altéré, et plus précisément lorsque l'artère sylvienne subit un dommage (occlusion ou hémorragie). Cette zone correspond à la partie latérale inférieure du cerveau, c'est-à-dire derrière les tempes.
Types d'aphasie selon la zone touchée
Selon la partie du cerveau qui est touchée, l'aphasie se manifeste par des symptômes variables et prend des dénominations différentes :
Partie du cerveau touchée | Type d'aphasie et symptômes |
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Arrêt ou diminution de la circulation sanguine dans la partie antérieure de l'artère sylvienne (AVC). | Aphasie de Broca associée à une hémiplégie droite :
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Arrêt ou diminution de la circulation sanguine dans la partie postérieure de l'artère sylvienne. Perturbations du champ visuel droit avec atteinte d'une zone spécifique du cerveau : l'aire de Wernicke. | Aphasie de Wernicke :
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Infarctus de l'artère cérébrale antérieure. | Aphasie transcorticale motrice :
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Obstruction de l'artère sylvienne dans sa totalité. | Dysgraphie : atteinte du langage écrit. |
Obstruction de l'artère sylvienne dans sa totalité. | Aphasie globale (forme la plus grave) :
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Infarctus sylvien concernant les noyaux gris centraux, le noyau lenticulaire, le noyau caudé, etc. | Aphasie sous-corticale :
|
Infarctus de l'artère cérébrale postérieure avec lésion du thalamus gauche chez le droitier. | Aphasie thalamique :
|
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Conséquences de l'aphasie
En règle générale, les personnes aphasiques éprouvent des difficultés ou ne peuvent plus :
- comprendre ;
- parler ;
- lire ;
- écrire.
Exemples de répercussions dans la sphère privée
Dans la sphère privée, l'aphasique ne peut plus :
- nommer les personnes et les objets ;
- répondre par oui ou non ;
- regarder la télévision ;
- écouter la radio ;
- lire le journal.
Exemples de répercussions dans la sphère publique
Dans la sphère publique, l'aphasique ne peut plus :
- entrer en contact avec une tierce personne (conversation impossible) ;
- téléphoner ;
- écrire (impossibilité d'écrire des lettres ou de remplir des formulaires) ;
- calculer ;
- se « débrouiller » dans un lieu inconnu (demander son chemin, commander une boisson, etc.).
Avant d'être pris en charge par un professionnel, l'aphasique a donc impérativement besoin d'une aide dans sa vie quotidienne.
Diagnostic de l'aphasie
Pour poser le diagnostic d'aphasie, le médecin procède à plusieurs examens, comprenant :
- un questionnaire ;
- un examen neurologique ;
- un électroencéphalogramme ;
- une tomodensitométrie cérébrale (scanner) ;
- une tomographie isotopique du cerveau (SPECT) par résonance magnétique ;
- un bilan orthophonique ou neuropsychologique.
Traitements de l'aphasie
L'aphasie étant le résultat d'une lésion cérébrale suite à une anomalie de la circulation sanguine, aucun médicament ne permet de la prévenir :
- Même si certains médicaments régulent la circulation, ils ne peuvent pas guérir une personne aphasique. De même, aucun acte chirurgical ne peut y remédier.
- Il est néanmoins possible de réduire au maximum les risques d'être victime d'un AVC en adoptant une bonne hygiène de vie.
- Seule la pratique d'exercices orthophoniques quotidiens permet la récupération partielle ou totale du langage (par la création de nouveaux réseaux neuronaux). C'est pourquoi on ne parle pas de traitement chez l'aphasique, mais de rééducation.
- Lorsqu'elle est consécutive à un AVC, la méthode de stimulation magnétique transcrânienne répétitive (rTMS) et la rééducation informatisée du langage accompagnée d'un thérapeute sont aussi préconisées. L'implication de l'aidant ou du partenaire par l'information et l'éducation thérapeutique est également indiquée.
À noter : des séquelles peuvent demeurer selon l'état de la personne (fatigue...) ou de la situation (prise de parole en public...).
Rééducation dans le cadre de l'aphasie
Intervenir le plus rapidement possible
La rééducation orthophonique doit être entreprise dès l'apparition des symptômes, car c'est à ce moment que la réponse du cerveau sera optimale. Elle commence donc souvent à l'hôpital, dans les jours qui suivent le diagnostic, et de façon intensive (à raison de cinq séances par semaine).
Durée de rééducation variable
La durée de la rééducation varie entre six semaines et un an. Elle dure en moyenne trois mois à raison de 45 minutes par séance. La vitesse d'amélioration varie selon :
- l'importance des lésions ;
- l'état de santé général de l'aphasique ;
- sa motivation ;
- son niveau d'éducation.
Si l'aphasique se sent déprimé, une aide psychologique lui est apportée. En outre, les proches seront mis à contribution afin de soutenir le patient et de l'aider dans ses exercices orthophoniques.
Pronostic en cas d'AVC
Le pronostic d'aphasie dans les suites d'AVC est généralement mauvais. Cela est d'autant plus vrai si :
- les troubles de la vigilance durent depuis longtemps ;
- le patient est incontinent pendant plus de 15 jours ;
- le patient présente une démence ;
- on observe une importante dépression ;
- la personne est âgée ;
- en cas d'hémiplégie, on n'observe aucune récupération motrice au bout d'un mois ;
- le patient a des antécédents de pathologies cardiaques ou d'AVC.
Exemples d'exercices orthophoniques
Les exercices orthophoniques peuvent varier en fonction des patients et de la gravité de leur état. Par conséquent, nous n'établirons pas un catalogue des différents exercices, mais ne donnerons que quelques exemples d'exercices utilisés pour le traitement de quelques aphasies.
Exercices pour une aphasie de Broca
La prise en charge consiste d'abord à stimuler le patient. L'orthophoniste travaille sur le versant réceptif en stimulant la compréhension :
- il utilise des ordres simples qui impliquent le corps (on demande au patient de tirer la langue...) ;
- il demande de désigner des objets qui sont dans sa chambre et de les classer selon divers critères.
Il travaille également sur le versant expressif afin de stimuler l'expression orale. Il emploie essentiellement des techniques pour lutter contre le mutisme :
- Travail des automatismes à partir d'une induction :
- compléter des phrases, des proverbes ;
- répéter des sons, des syllabes ;
- répéter avec aide mélodique.
- Travail de l'articulation : praxies bucco-faciales par imitation, voire directement si cela est possible.
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Exercices pour une aphasie de Wernicke
Dans un premier temps, on cherche à faire prendre conscience du trouble au patient. Pour cela, on peut utiliser un enregistrement audio ou vidéo, qui permet de :
- canaliser l'attention du patient en proposant des exercices de compréhension orale ;
- proposer également des exercices de jugements de phrases et de repérage d'intrus ;
Pour certains patients aphasiques, demander une écoute silencieuse tout au long de la rééducation peut les amener à retrouver une certaine qualité d'expression.
Exemple : en cas de production langagière logorrhéique, demander au patient de se taire, le lui faire comprendre par la mimique ou le geste.
Exercices pour une aphasie globale
On utilise ici la même approche que celle évoquée dans le cadre de l'aphasie de Broca. Le pronostic est toutefois très réservé dans ce cas.
Aussi dans la rubrique :
Types de troubles du langage
Sommaire
- Introduction aux troubles
- Principaux troubles du langage
- Divers